Je démissionne pour
la cinquantième fois de l’année.
J’comprends pas
tous ces connards qui veulent me faire taffer,
qui me filent un job
parce que j’ai postulé.
Fallait bien que
j'fasse un truc pour m’occuper,
pour m'empêcher de culpabiliser
de passer dans cette vie comme dans un défilé.
Sont pas sérieux,
j’ai jamais rien demandé,
surtout pas qu’on
me file des responsabilités.
J’présente bien
mais faut pas se leurrer
j’ai jamais été
motivée.
Déjà au lycée, je
passais mon temps à sécher.
Faut surtout pas me
demander de quoi demain sera fait.
J’ai l’impression
que j’recule d’année en année.
Je paresse de
journée en soirée.
Et encore, on est
qu’en janvier.
Je sais jamais
quelle heure il est.
Je confonds l’hiver
et l’été.
Je me noie dans un
putain de sablier,
j’bois la tasse,
je perds pied.
L’horloge va
jamais s’arrêter.
Mais j'crois qu'il y a un truc que j'ai oublié.
Alors, j'démissionne.
J'sors de ma zone
de confort, je frissonne,
quitte à passer pour une conne.
Et je m'étonne
d'avoir encore des munitions.
De savoir encore dire non.
J'ai cru que j'allais me mettre à écrire.
J'ai cru que j'avais les mots pour le dire,
mais il est peut-être temps de vieillir,
d'être sage comme un singe,
comme un ange qu'on épingle,
sans les ailes, ça, ça gène,
bien poli au fond de son siège.
Oublie de sourire, c'est un piège.
Tu vois, je sais même pas où j'veux en venir.
Je vais me contenter de faire des rimes,
je reviens à mes premiers crimes,
à mes premiers amours,
quand je disais que ça durerait toujours,
à ma mère, à mon père,
à la sortie du collège, à mes frères.
Je veux écrire et j'm'en fous si ça fait rire.
Bientôt 30 ans, tu vois l'délire.
Quand j'écris, c'est pour le pire.
Quand j'suis trop bourrée pour séduire.
Quand j'le vois partir sans rien dire.
Quand ça retourne tellement le bide que ça doit sortir.
J'écris comme on se force à vomir,
en se disant que ça ira mieux après.
Dans un jour, dans un an, après l'décès.
J'ai du mal avec mes vérités
mais je crois que j'ai jamais arrêté.
Jamais arrêté d'y rêver
et j'continue d'y croire une fois le soleil levé.
Alors, j'démissionne.
J'sors de ma zone
de confort, je frissonne,
quitte à passer pour une conne.
Et je m'étonne
d'avoir encore des munitions.
De savoir encore dire non.
Je vis avec mes vingt-cinq
personnalités,
à vingt-cinq dans 25m².
Je ramène des mecs
croisés en soirée.
J'mène la vie d'une ado paumée.
Ma meilleure pote
vient de se marier.
'Y a un décalage dans
tout ce que je fais.
Ou plutôt dans ce
que je ne fais pas,
comme si j'pouvais
pas tomber plus bas.
J’ai déjà perdu
l’combat
avant d’l’avoir
commencé, j’bats
en retraite, c’est
pas pour moi.
'Y a tout un tas de
trucs que j’comprends pas.
La vérité
m’emmerde, laisse moi rêver.
J’arrive pas à
dormir, laisse moi tiser.
T’as de beaux
yeux, laisse moi te sucer.
Je confonds l’amour,
l’amitié,
les connards, les
mecs bien intentionnés.
On est bien loin du
conte de fée.
Faut qu’j’arrête
de croire c’qu’on me dit.
Faut que j’arrête
d'boire quand il sourit,
de prendre de la merde pour de la poésie,
tout ça parce qu’il
dit que j"suis jolie.
Alors, j'démissionne.
J'sors de ma zone
de confort, je frissonne,
quitte à passer pour une conne.
Et je m'étonne
d'avoir encore des munitions.
De savoir encore dire non.
Je ne vois pas le temps qui passe.
Gamine, j’étais
première de la classe
mais depuis dix ans
j’suis dans une impasse.
Je connais bien les
voisins, le quartier,
j’arrive pas à en
bouger.
Il paraît que j'fais plus jeune que mon age.
J’ai encore de
l’acné plein l’visage
toujours pas mon
permis, ça m’arrange.
Mais peut-être que
derrière ce déballage
pousse un petit brin
de courage.
Je démissionne, pour de bon,
je retrouve ma concentration.
Peut-être même que
j’en suis fière
que jviens de poser
la première pierre
de quoi paver le
chemin
vers un autre
demain.
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