amour
couple
site de rencontre
J’aiTrouvéL’HommeParfaitEtJ’MeFaisChier.com
12:30
Il y a quelques temps, j’ai succombé aux sites de rencontre.
Oui, au pluriel. Oui, c’était la dèche, j’avais faim, je venais de
déménager, je ne connaissais personne… et je ne sais pas pourquoi
j’éprouve le besoin d’autant me justifier !
Donc, deux sites. Autant faire les choses à fond, et multiplier les chances de succès. J’avais donc opté pour adopteunmec
(oh ça va, levez pas les yeux au ciel, je sais que vous l’avez toutes
fait), aucun commentaire pour l’instant, je crois qu’il y a trop de
choses à dire, j’écrirais peut-être même un article sur le sujet. Et, un
plus sérieux, et donc forcement moins swag (je jure, c’est la première
fois de ma vie que j’utilise ce mot) Pointscommuns.
Comme son
mot l’indique, il « suffit » (en général, ça prend bien une semaine,
contrairement à adopte où il suffit d’une photo avec la bouche en cul de
poule et de choisir entre string ou boxer) de remplir un formulaire de
looongues listes de tout ce que tu aimes ou n’aimes pas,
en littérature, cinéma, loisirs, goûts culinaires, télévision… et le
site fait des calculs hautement scientifiques pour te trouver la perle
rare qui aura exactement les même goûts que toi, en à peu près tout. Et
avec qui tu pourras parler du livre que lui aussi a lu et aimé. Regarder
ensemble un film que vous avez tous les deux vu et aimé. Manger la même
nourriture que vous adorez et, par la même occasion, être un vieux
couple qui n’a plus rien à se dire avant même votre premier rencard !
Félicitations !
Parce que oui, au début, j’ai trouvé le concept intéressant. Je me suis dis, plus aucune dispute. Plus d’incompréhension.
Plus de longs soupirs venant du siège à côté pendant la énième
rediffusion d’un film finlandais en version originale non sous-titrée.
J’ai coché des cases. Woody Allen mais dans sa première période. La
littérature américaine mais surtout les années 60. Les sushis oui. Les
sashimis moins. Des cases. Des cases. Encore des cases. Et plus
j’énumérais, plus je me voyais creuser une jolie tombe et m’enfermer
moi-même dans une case. Et puis d’un coup, ça m’a sauté au visage :
deux psychopathes enfermés dans une cave, collant leurs choses préférées
sur les mûrs. Si je rencontrais mon double, mon jumeau version
masculine, non seulement ça serait flippant mais en plus, putain,
qu’est-ce qu’on se ferait chier !
Je me
suis souvenue d’un type avec qui j’étais sortie à la fac. On était
jeunes, cools, brillants, forcément, citant des auteurs à la même
vitesse qu’on allumait des cigarettes. Et s‘il y a bien une chose que
j’ai retenue de cette période, c’est que j’étais devenue conne et
élitiste. Il n’y avait jamais aucun débat parce qu’on pensait tous la
même chose (qu’on avait lu dans le même bouquin), on se confortait dans
l’idée qu’on avait raison en permanence, les autres
n’avaient rien compris à la vie, alors que nous, nous étions sur le
point de changer le monde. On n’est pas restés longtemps ensemble, il
avait un air paternaliste et moralisateur qui m’a vite exaspérée. Et m’a
foutrement donné envie d’aller voir à quoi ressemblaient les autres,
ceux qui avaient tort, et de me frotter à leurs différences.
Aujourd’hui,
j’ai un copain (j’ai toujours l’impression d’avoir 12 ans quand
j’utilise ce mot. Et 10 si j’utilise « amoureux ». Alors à choisir…) et
j’ai arrêté les sites de rencontres (amen). Quand on nous voit ensemble,
les gens sont plutôt surpris. On n’a ni le même style
vestimentaire, ni les mêmes goûts. On ne vient pas de la même région, ni
du même niveau social (ça fait con de dire ça, mais ça peut jouer sur
un couple), on n’a pas le même âge, on n’a pas fait les même études.
Je suis plutôt rock, il est reggae.
J’aime le ciné indé, il préfère les grosses productions.
Je lis tout le temps, il déteste ça.
Il aime le sport, je déteste ça.
Je préfère le poisson, lui la viande.
J’adore voyager, il adore rester chez lui.
Je suis solitaire, il a des tas d’amis.
Je suis en talons aiguilles 24h/24, il porte des baggys et des chaussures de skate.
J’ai
passé des soirées à découvrir le mouvement Rastafari. Je lui ai cuisiné
des petits plats bien de chez moi. Je le traîne à des concerts et ça le
dérange pas (du tout, mais alors pas du tout) de partir en plein set
pour aller nous chercher des bières. J’ai appris la différence entre un
nain, un elfe et un hobbit. Souvent nos conversations commencent par «
C’est bizarre, tu vois, moi j’aurais plutôt dit que…» et se terminent
par « Ah oui, c’est pas con ça ! »
En fait, ça fait deux ans qu’on se dit qu’on n’a absolument rien en commun.
Sauf peut-être le fait d’être amoureux.
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